« Il y a deux attitudes : notre culture de l’écrit où on assiste à un évènement et on en montre les photos, et où probablement un type avec une plume écrira « et le piano, alors, s’envola dans les airs… » *geste ample de la main, regard qui le suit et se perd lyriquement vers le ciel déclinant de ce mardi seize juillet deux-mille treize*. Et une culture de l’oral, où le type raconte. »
(De retour au Faï, François me demandant les photos du fameux envol de piano)
HOrS-foRmAt (HF pour les intimes) vous conte le tout, à l’écrit…
Ciel bleu, soleil. Mardi 16 juillet et 16ème étape du Tour, 8h du matin, route principale de Veynes.
Pendant que le chaland patiente à l’ombre d’un soleil à vous griller net la cuisse sans même besoin du barbecue de la CGT installée sur le trottoir d’en face ; il y a Michel, Jean-Mi, Philippe et puis Aline, pas à bicyclette comme le chante Yves Montand mais plutôt montant vivement (sans chanter mais enchantés) des bicyclettes sous le piano perché du FestiFaï – ce fameux piano bleu qui depuis 3 ans maintenant grimpe chaque été aux arbres veynois en l’honneur du festival –. en une voile de vélo, pianos, trottinettes, cymbales, accordéons, roues et autres objets volants tout à fait identifiés…
Le pouvoir du langage
Né d’un mot bien tombé au bon moment (et dans la bonne oreille), l’idée de faire défier la gravité à ces instruments d’ô-delà atteint d’un coup de pédale n’a pas eu besoin de neuf mois pour voir le jour. Sur évocation du passage des pianos perchés au JT pour l’étape veynoise du Tour 2011 lors d’une présentation de FestiFaï 2013 au Dauphiné Libéré, le projet a finalement grandi en moins d’une semaine : pas le temps de tester l’installation, on improvise sur place car« FestiFaï : c’est hors-format ! ».
Bleu Azur...
L’ombre d’un piano qui s’éloigne lentement au sol. Rayons de soleil et rayons de roues s’alignent. Il est midi.
4h et l’équivalent de 800kilos liés à la ficelle – composés de 13 vélos, 2 trottinettes et 2 pianos, 4 cymbales, 1guitare, 2 accordéons, un condor rouge et or de papier, 2 tambours, quelques roues et une banderole – plus tard, on hisse enfin haut la voilure de FestiFaï suspendue au bras-grue du camion de Michel, charpentier et envoleur de pianos de son état.
Philippe : « J’aime bien regarder le Tour de France, mais seulement à l’ombre d’un piano »
La Caravane passe et on n’crie pas, on lève les bras pour la lessive Xtra
On aurait presque envie de chanter « Tu t’envoles » de Peter Pan, mais les p’tits hommes verts de PMU montés sur faux canassons auraient peut-être été vexés qu’on leur pique leur couleur, allez savoir…Il est 14h maintenant et la Caravane passe avec acclamations : sur la route, le spectacle commence enfin.
Monte décrocher le Soleil,
Rêve dans un demi-sommeil,
Tourne, tourne dans le vent,
Surplombant la planète argent,
Décolle et batifole,
Tu t’envoles, Tu t’envoles, Tu t’envoles
[Tu t’envoles- Peter Pan, adaptation spéciale Tour de France/FestiFaï]
Pendant plus de 30 minutes on collecte saucisson, lessive, chapeaux, porte-clefs, madeleines, bonbons, journaux, sirop, choses non identifiables au son de « give me everything tonigth » et « ils m’entraîneeent au bout de la nuit, les démons de minuit » (ah la bicyclette d’Yves Montand est décidément bien loin)… Entre cochonou et courtepaille, le ministère de l’intérieur en voitures de police nous fait même un p’tit coucou. La récolte est en tous les cas fructueuse, mais toujours point de deux roues à l’horizon, ni d’ailleurs de caméra…
« il vous aurait fallu un gros logo PMU et c’était bon » (Hugo)
Certains chars s’arrêtent tout de même entre deux lancers de madeleine ou de lessive dont Courtepaille qui nous gratifie d’un « ça fait plaisir de voir les artistes qui s’impliquent aussi » ou de Belin « Et regardez l’architecture, c’est sublime, allez les Veynois tous les mains en l’air ! ». Et de repartir de plus belle : « give me everything tounaïite ».
Du grand spectacle, on vous dit.
Les trains, les sons et les couleurs se répondent : nouvelles correspondances
Et les coureurs dans tout ça? Les trains défilent, mais niveau vélo c’est toujours zéro. Heureusement une équipe de volontaires descendue en renfort de la Ferme du Faï –haut-lieu du festival- nous chauffe le public au son d’une composition percu déchaînée…
Et là, enfin ! Le peloton débarque : c’est joli avec la vitesse ça fait l’effet d’un tableau impressionniste. D’ailleurs 2 secondes plus tard, notre œil est rendu au gris du bitume et au bleu du ciel. Quinze minutes après, on a le droit à deux secondes de bonus roulant. Et puis, plus rien.
La route vide, grand désert sous le chaud soleil des Hautes-Alpes, semble soudain nous faire signe : c’est qu’il est temps d’aller boire une bière bien fraîche au Pmu du coin se remettre de ces émotions sportives !
FestiFaï pendant ce temps ne chôme pas et descend sa voile : elle se lèvera mardi prochain sur une véritable embarcation cette fois, le piano flottant de Voël et une envolée d’émotions quelque peu plus musicales…
Remerciements éternels à Véronique O., qui d’un mot a fait naître cette idée de bric-et-de broc et tout à fait « sublime » (Belin).