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Echos 2013

Des festivaliers installés devant la Trompe des fréquences graves

Des festivaliers installés devant la Trompe des fréquences graves

 

Des musiciens, leurs instruments et…la montagne. De 20h à 3h, ce dernier week-end de juin à la Ferme du Faï (Le Saix, Hautes-Alpes), Echos 2013 a fait résonner falaise, étoiles et corps : 6 artistes, 220 auditeurs de toute la France, que des bons échos pour la première de ce festival pour le moins atypique…

Echos, c’est d’abord et surtout la présence en pleine nature d’un gigantesque système amplificateur sonore – les Trompes du Faï- qui depuis 1997 exacerbe et développe les échos inhérents au lieu, perché dans les Hautes-Alpes à 1100m d’altitude. Venus dialoguer avec cet « instrument », six explorateurs de son issus de la scène expérimentale, drone et ambient, programmés par l’association lyonnaise Dôme, se sont pris au jeu de cette réverbération sonore naturelle exceptionnelle.

D’un genre musical d’initiés à une expérience sonore pour tous

Si les noms des artistes présents – Insiden, Tamagawa, Cascade, Yann Gourdon, Anthez, Saåad – vous sonneront abscons, l’expérience, elle, s’adresse à tout un chacun: « on est sûr que cela peut toucher tout le monde, lance Camille présidente de l’association, ils m’ont converti à leur musique parce qu’ils étaient passionnés, ils m’ont transmis leur passion autour d’une musique que je trouvais à l’origine complètement obscure, hermétique, et comme je suis une convertie, je sais que n’importe qui peut être touché, mais il faut avoir la curiosité de faire la démarche d’aller dans des lieux comme cela ». Et en effet, des vacanciers curieux côtoient un public d’initié, certains ayant fait plus de huit heures de route pour l’évènement…

Arrivée des festivaliers par le chemin d'accès à la Ferme du Faï

Arrivée des festivaliers par le chemin d’accès à la Ferme du Faï

 

La musique comme mouvement plutôt que produit

Fatigués d’une musique manufacturée, produit de consommation à grande échelle (on achète un morceau, on le consomme, on le jette), les membres de Dôme ont voulu déranger les codes et formats habituels d’une écoute de la musique cloisonnée dans des standards qui constituent à présents notre quotidien. Redéfinir ou plutôt indéfinir les frontières de nos pratiques musicales, les libérer, leur redonner leur mouvement initial voilà un défi qui est à l’image des Trompes : de taille !

Et ça marche, ou plutôt ça se ballade : les auditeurs se prennent au jeu et cherchent le meilleur point d’écoute, plongés dans l’herbe, les étoiles, les vibrations. « L’idée n’est pas de regarder le musicien en train de jouer mais plutôt que chacun construise sa soirée selon ses déplacements » explique Camille. C’est d’ailleurs ce qui a séduit Merryl, auditrice lyonnaise à la recherche de concerts « où la scène n’est pas à 1m20 du sol, point barre ». De part et d’autres des versants qui font face à la falaise, on entend des applaudissements résonner, eux aussi.

Un spectateur à la recherche de l’écoute idéale

Lady Gaga, l’estomac indifférent à l’évènement

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Maîtriser l’incontrôlable : un défi sonore

Situés sur la scène du « Théâtre de verdure » – scène à ciel ouvert en contrebas de la Ferme- les artistes ont cependant dû jouer de cette particularité qui les éloigne de la réception du son direct, ne laissant percevoir que certains des échos renvoyés par la falaise, produisant ainsi un décalage entre le son perçu par l’oreille et le son perçu par le micro : « il y a une distance qui nous demande une grande capacité d’imagination » indique Saåad. Une dimension aléatoire due aux conditions climatiques, à un mélange de jeu acoustique et amplifié, ou donc un décalage de perception qui semble plus relever du défi que du problème : « sur la scène on ne sait pas comment va se comporter l’écho, le lieu est en soi une composante musicale. Il est très riche » (Saåad). Jean-Michel Pillone, directeur qui a vu au Faï des musiciens défiler : « c’est un dispositif qui n’est pas du tout évident pour les artistes. Il y en a qui s’y cassent les dents, d’autres qui les utilisent avec une facilité déconcertante. »

Technologie et nature, dichotomie ici exploitée sans contrainte de la frontière

Julien de Cascade aux réglages

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La dynamique Echos : un lieu propice à la création

Ce qui n’empêche pas le lendemain certains auditeurs d’expérimenter eux-mêmes l’instrument hors-normes pendant que d’autres découvrent les sentiers de randonnée. Si la performance musicale n’a pas été du goût de chacun, tous s’accordent sur la qualité ou plutôt l’étrangeté d’écoute du lieu : « c’est le lieu qui est fou » lance l’un des festivaliers. Et en effet, certains corps ne semblent pas vibrer que de son mais aussi de projets création futurs, dans un lieu où, selon  Julien de Cascade, « toutes les conditions pour une résidence y sont réunies, ce qui est souvent difficile à avoir : le fait d’avoir ici un environnement, un espace et un temps dédié est quelque chose de très précieux ». La Ferme du Faï se trouvant être à l’origine le site d’accueil de chantiers volontaires de Villages des Jeunes, délégation de Solidarités Jeunesses, il bénéficie effectivement d’une dynamique de groupe qui favorise les échanges et rencontres, tout en se situant dans un endroit « qui centre », isolé de l’agitation urbaine. Pour René Dupré, le rénovateur des Trompes, c’est principalement la présence de ce système audio hors-normes qui constitue une chance, « qui change la qualité d’écoute » et permet de « s’ouvrir à des artistes que l’on aurait jamais écouté auparavant ».

 

Dimanche 30 juin: un festivalier explore à son tour le système

Ouvroir potentiel de curiosité, les Trompes semblent bien décidées à perpétuer les Echos…

 

 

Élargir la lecture:

Prise de son directe avec les artistes

La critique de la soirée

Les Trompes à Paris

Le site officiel

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